La chronique de Jaime : le Pass Culture
- pierrehyppolite
- 3 oct. 2021
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 17 juil. 2022
Réjouissons-nous, le Pass Culture a fait vendre des livres dans un pays où, paraît-il, on ne lit plus beaucoup ! Ce dispositif, mis en place dans toute la France par le gouvernement en mai 2021, permet aux jeunes de 18 ans de bénéficier de 300€ destinés à l’achat de biens ou à la réservation d’activités culturels. Et les chiffres sont limpides : 53% des sommes dépensées grâce à ce Pass étaient pour des livres, là où la part pour le cinéma ne s’élève qu’à 17% et celle pour les instruments de musique à seulement 13%. Toutefois, à la période de Noël, particulièrement fructueuse pour l’industrie du livre, venant tout juste de débuter, un petit bilan s’impose quant aux secteurs littéraires les plus privilégiés par ceux qui ont été dotés d’un Pass Culture.
Sans surprise, c’est le secteur du manga qui caracole en tête des ventes, et de loin : 81,6% des livres achetés grâce à ce Pass, plus précisément. En effet, au moins 1,5 million de mangas auraient été écoulés depuis le printemps dernier, et notamment parmi des classiques du genre ou les plus populaires du moment. Ainsi, le podium est composé de One Piece, avec plus de 300 000 ventes, et Demon Slayer et L’Attaque des titans, avec environ 200 000 ventes chacun ! Viennent ensuite dans le classement My Hero Academia, Jujutsu Kaisen, Berserk ou encore Naruto, et cinq autres titres de manga. Cela expliquerait en partie pourquoi en France, cette année, 15 des 22 ouvrages vendus à plus de 5 000 exemplaires sont des mangas.
Ce résultat en dépite sûrement certains et les conforte sans doute dans l’idée que les jeunes ne s’intéressent plus à la littérature française, faisant croître leur mépris pour ces énergumènes à peine majeurs lobotomisés par la culture nippone et dont le vote a à présent le même poids que le leur. Néanmoins, il faut garder à l’esprit que les inscrits au Pass Culture sont influencés par leur époque, à savoir un héritage auquel ont participé, plus ou moins directement, ceux critiquant le plus vivement les goûts littéraires de leurs cadets. En effet, la France n’est-elle pas connue depuis des décennies pour être le 2e plus gros consommateur de mangas après le Japon ? Et Netflix ne fait-il pas depuis quelques temps la promotion d’innombrables animés, souvent adaptés de mangas ?
Par ailleurs, le manga n’est pas l’unique genre littéraire intéressant les jeunes de 18 ans puisque La Chronique des Bridgerton a par exemple eu un grand succès en ventes papier, vraisemblablement dû à la série Netflix adaptée de cette saga sortie fin 2020. On pourrait tout à fait émettre des réserves quant à l’âge des bénéficiaires à ce Pass Culture, dont l’âge minimum reculera à 15 ans dès janvier prochain, puisque les principales utilisations sont tournées vers les livres, et surtout les mangas, et très peu vers les autres offres culturelles, pourtant beaucoup mises en avant par le gouvernement français, telles que le théâtre, les concerts ou les expositions. Elles auraient peut-être été davantage mises à l’honneur si les bénéficiaires du Pass avaient été dans la tranche des 18-25 ans (plus aptes à se déplacer à des évènements culturels). Il faut toutefois se rappeler qu’il est normal d’être plus grégaire en termes d’attirance culturels et littéraires lorsque l’on est adolescents que lorsque l’on est un jeune adulte, et que ce Pass Culture a le mérite de mettre sur un pied d’égalité tous les jeunes de 18 ans, toutes classes sociales confondues, face à un accès à la culture, bien qu’il soit surement déjà donné à certains d’entre eux par leur famille.
Selon l'entourage du chef de l'État, le coût du pass Culture serait de 80 millions d'euros : 59 millions pour l'État, 9 millions de reliquat sur 2020 (conséquence de la crise sanitaire) et 12 millions de valorisation des offres des partenaires. Pour 2022, année de l'extension à partir de la 4e, le budget correspondant est "en cours de calibrage".



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