La chronique d'Eurydice : Écrire sans éditeur : l’autoédition, agent de l’émancipation féminine
- pierrehyppolite
- 8 nov. 2021
- 2 min de lecture
Dernière mise à jour : 17 juil. 2022
Il y a un peu plus de 7 ans, une jeune autrice née en Inde et élevée au Canada publiait, alors qu’elle entamait sa dernière année d’université, un recueil de poésie.
La particularité de son livre ?
Elle l’auto publie en 2014, et depuis sa parution, Milk and Honey a vendu près de 3 millions de copies à travers le monde.
D’abord rejetée par les éditeurs, elle précise dans la légende d’un photo Instagram - média par lequel elle s’est fait connaître du public - :
J'ai ensuite auto-publié le livre avec l’aide de mes amis. Je m’attendais à vendre quelques exemplaires, finir mon diplôme, puis passer à autre chose, mais l’univers avait d’autres plans. Pendant que je me produisais sur scène, mes petites sœurs vendaient des exemplaires à la sortie. Vous en avez acheté un si grand nombre et en avez tellement parlé que ça a attiré l’attention des éditeurs. Tout à coup ils se disaient “qu’est-ce que c’est que ce livre auto publié qui débarque dans nos listes de meilleures ventes et à quel moment c’est de la poésie ?”
Milk and Honey, qui aborde notamment le deuil, la féminité, les abus vécus par l’autrice ainsi que son héritage Sud Asiatique, décrit avec des mots simples, les maux de milliers de jeunes filles, maux qui étaient si durs à dire.
Si l’auto-publication permet d’éviter ou de contourner le rejet des maisons d’édition, elle est aussi, et en particulier pour les minorités discriminés, un moyen de pouvoir s’exprimer sans que son discours ne soit coupé, caché, écumé.
Cette caractéristique n’est pas anodine pour les écrivaines car si aujourd’hui le monde de l’édition s’est diversifié, publier des livres est longtemps resté un privilège réservé aux hommes, privilège dont certains ont usé et abusé.
Ainsi, après la mort de Sylvia Plath, son mari l’écrivain Ted Hugues, également éditeur, publie le recueil Ariel. Quelques années plus tard, on découvre que non seulement il a réarrangé l’ordre des poèmes du livre, mais également enlevé certains poèmes, ceux qui le dépeignaient de manière négative.
Lorsqu’il choisi une sélection de poèmes d’Emily Dickinson pour une publication de Faber en 1968 dont il rédige l’introduction, le premier poème qui figure dans le livre s’ouvre sur :
« That Love is all there is
Is all we know of Love; »
À ce prix-là, on comprend pourquoi la poète américaine, de son vivant, choisit de ne pas publier ses poèmes, mais de confectionner elle-même des feuillets, reliés et cousus, pour les garder pour elle et ses proches.



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