Isabelle Paccalet
Professeure en rédaction éditoriale du M1
Pouvez-vous nous dire en quoi consiste votre enseignement ?
Mes interventions dans le master recouvrent deux aspects.
Il s’agit, d’une part, d’apporter ma connaissance du milieu de l’édition et des métiers de la rédaction. C’est pourquoi je propose, à chaque début de séance, qu’un.e étudiant.e intervienne pour présenter un événement lié au milieu de l’édition. Cela permet d’exercer une veille professionnelle et aussi de s’entraîner à une prise de parole brève et efficace, exercice auquel est souvent confronté.e un.e éditeur.trice (ce qui demande aussi une préparation écrite).
D’autre part, et cela constitue la plus grande partie des séances, nous abordons l’écriture de différents types de textes de commande. Chaque fois, je présente un type d’écrit professionnel et je propose de s’y exercer : biographie, quatrième de couverture, résumé… Puis j’invite les étudiant.es à prendre du recul sur leur texte avant de me l’envoyer. Enfin, je leur demande d’améliorer leur première version à partir des commentaires que je leur ai adressés. Le but est que chacun.e acquière un regard critique sur sa propre écriture, avant de pouvoir l’exercer sur les travaux d’autres rédacteur.trices.
Quels sont vos objectifs personnels dans l’enseignement de la rédaction éditoriale ? Et quelles sont les compétences acquises par les étudiants ?
Je souhaite surtout transmettre un savoir-faire. Apprendre aux étudiant.es : à adapter des capacités d’écriture personnelles à un usage professionnel ; à savoir prendre du recul sur leur production pour mieux évaluer celle d’autrui. J’espère les amener à se rendre compte que, par la pratique régulière, l’écriture s’améliore ; les convaincre des bienfaits de relectures multiples. Il s’agit surtout de mettre l’écriture au service de tous et de savoir répondre à des contraintes : de forme, de longueur, de public… Il s’agit d’être attentif à la variété de la syntaxe, d’apprendre à éviter les répétitions, à faire gagner la phrase en efficacité, à veiller à être extrêmement compréhensible. Cela passe par une attention accrue à ce que l’on lit, par l’étude d’exemples.
Les étudiant.es qui se prêtent avec sérieux à la reprise de leur texte en tenant compte des indications progressent. Le but est d’acquérir une plus grande aisance, une plus grande fluidité de la langue, d’adopter un regard critique sur les textes, de savoir répondre à des consignes précises
Quel est votre parcours ? Pensez-vous qu’il y a une leçon à tirer de celui-ci ? Comment et pour quelles raisons vous êtes-vous dirigée vers l’enseignement?
J’ai une formation à la fois technique (école Estienne des Arts et Industries graphiques) et littéraire (licence de Communication et maîtrise de Littérature générale et comparée). En tant qu’éditrice, j’ai travaillé sur des manuscrits très variés, des ouvrages collectifs ou personnels (essais et romans), avec plus ou moins de possibilité et/ou de nécessité d’intervention – de la « simple » correction à la refonte totale d’un texte –, avec différent.es interlocuteur.trices : auteur.trices, traducteur.trices, éditeur.trices mais aussi le service commercial ou marketing, les rédacteur.trices de quatrième de couverture…
Chaque parcours a sa propre cohérence et offre son lot de surprises et d’opportunités ; en début de carrière, je n’aurais jamais imaginé enseigner, par exemple. Travailler sur les textes d’autrui apprend surtout l’humilité et la diplomatie.
J’ai d’abord formé « sur le tas » des stagiaires, souvent en master d’édition, à la rédaction de quatrièmes de couverture et d’argumentaires commerciaux. Cela m’a amenée à réfléchir concrètement à la façon dont on peut aider une personne à améliorer ses écrits, l’efficacité de son message. Puis j’ai fait quelques interventions ponctuelles à l’université pour présenter mon activité et plus généralement le secteur de l’édition, et j’y ai pris goût. J’enseigne également la correction et je présente le milieu éditorial en master d’écriture créative.
L’enseignement ne constitue qu’une partie de mon activité. Il s’agit avant tout pour moi de transmettre un savoir-faire, une exigence de qualité ; d’aider à décrypter un milieu assez fermé, avec ses codes et ses non-dits.
À l’égard des adaptations liées au confinement notamment, comment envisagez-vous le futur de cet enseignement ? (nouvelles méthodes, re-structuration du cours, etc.).
J’espère bien que cette période était exceptionnelle. Bien qu’il s’agisse d’écriture, un travail qui pourrait paraître solitaire, il y a une grande richesse à partager les exercices en séance, à découvrir toutes les façons dont on peut les aborder en les lisant (comme on partage la production dans un atelier d’écriture), en écoutant les autres participant.es.
En dehors du programme proprement dit, j’apprécie les échanges informels, les digressions, les rebonds sur l’actualité…
À vrai dire, si l’enseignement à distance devait perdurer, je ne sais pas si je poursuivrais.